LES DESCENDANTS74
PROPAGANDE ET LEGENDE
PERPLEXITES DE L'HISTOIRE


"C'était la destinée de Napoléon, serait-ce un jour la sienne"

Stendhal75


L
es dernières années de la duchesse de Leuchtenberg furent consacrées à la liquidation de la succession de son mari et à l'établissement de leurs enfants. Ils en avaient eu sept, qui leur donnèrent une postérité aussi importante par les titres que par le nombre et en firent, avant la reine Victoria ou le roi Christian IX, de véritables grands-parents de l'Europe. On a calculé que parmi leurs descendants ayant vécu jusqu'en 1990 un quart appartenaient à des familles souveraines ou médiatisées. Telle fut la récompense posthume d'une princesse qui dans la ligne tracée par son père et son beau-père, n'avait jamais envisagé l'avenir que sous la forme de trônes et de couronnes.


Sa fille aînée, Joséphine Maximilienne Eugénie Napoléone (Milan 14 mars 1807 - Stockholm 7 juin 1876), avait été faite dès l'enfance princesse de Bologne et duchesse de Galliera, ce qui incluait un palais en ville et des terres aux environs. Cela lui fut conservé après 1814. Bien que Napoléon eût blâmé par avance toute union avec la famille royale de Suède, on la maria en 1823 avec Oscar Joseph François, fils de Bernadotte et de Désirée Clary, filleul du premier Consul. Elle fut reine de Suède de 1844 à 1859. Marraine du prince impérial, fils de son cousin germain Napoléon III, elle se fit représenter au baptême par Stéphanie de Bade (1856). Elle est l'ancêtre des actuels souverains de Suède, Norvège, Danemark, Belgique, de la grande-duchesse de Luxembourg et de la reine (en exil) de Grèce.

La deuxième fille, Eugénie Hortense Auguste (Milan 23 décembre 1808 - Freudenstadt 1er septembre 1847), que l'on appelait parfois Eugénie parfois Hortense, s'unit en 1826 à Frédéric-Guillaume Constantin Hermann Tassilo, prince de Hohenzollern-Hechingen. Ce neveu de la duchesse de Dino hérita en 1838 d'une principauté de 18 000 habitants (aujourd'hui dans le Bade-Wurtemberg) mais dut y renoncer à la suite de la révolution de 1848. Mal accordée avec lui, elle s'occupa de bonnes oeuvres, de voyages, de musique et mourut de tuberculose.

Le fils aîné, Auguste Eugène Charles Napoléon (Milan 9 décembre 1810 - Lisbonne 28 mars 1835), que l'Empereur avait eu l'intention de créer prince de Venise, fut titulaire du majorat de Navarre à partir de 1814 (converti en rentes en 1834). Deuxième duc de Leuchtenberg après la mort de son père et un moment candidat au trône de Belgique, il épousa en 1835 Marie II reine de Portugal et mourut de diphtérie deux mois plus tard.

La troisième fille, Amélie Auguste Eugénie Napoléone (Milan 31 juillet 1812 - Lisbonne 26 janvier 1873), fut la seule à la naissance de laquelle l'impératrice Joséphine assista. Mme de Wurmb fut sa marraine. On la maria en 1829 à Pierre Ier empereur du Brésil, qui abdiqua en 1831 et était par un premier mariage père de la reine Marie II. Elle n'eut elle-même qu'une enfant, morte tuberculeuse à l'âge de dix-neuf ans.

Une quatrième fille, Théodelinde Louise Eugénie Auguste Napoléone (Mantoue 13 avril 1814 - Munich 1er avril 1857), née dans les circonstances difficiles que l'on sait, avait reçu le nom d'une reine quasi mythique des Lombards, originaire de Bavière. On la surnommait Linda. De santé fragile et de caractère inquiet, elle s'unit en 1841 à Guillaume Alexandre Ferdinand duc d'Urach, comte de Wurtemberg, avec qui elle s'installa au château de Lichtenstein près de Reutlingen (aujourd'hui Bade-Wurtemberg). Leurs quatre filles eurent douze enfants. Sa principale descendance vient du premier mariage de sa fille aînée avec un comte d'Enzenberg (Tyrol autrichien).

La petite princesse Caroline Auguste Clotilde ne vécut que quelques mois à Munich en 1816.

Enfin le second fils, Maximilien (ou Max) Joseph Eugène Auguste Napoléon (Munich 2 octobre 1817 - Saint-Pétersbourg 20 octobre/1er novembre 1852), troisième duc de Leuchtenberg, dernier titulaire du majorat de Navarre, épousa en 1839 la grande-duchesse Marie, fille du tsar Nicolas Ier. Celui-ci leur donna les palais Marie à Saint-Pétersbourg et Leuchtenberg à Peterhof. Ils eurent sept enfants, princes ou princesses Romanovsky ou Romanovska. Leur fille aînée Marie épousa un prince de Bade et en eut le margrave Max de Bade (1867-1929), dernier chancelier de l'Empire allemand en 1918, homme de réputation libérale apparenté à la famille de Stéphanie de Beauharnais et par là aux rois de Roumanie et des Belges. Trois des fils furent tour à tour ducs de Leuchtenberg. Dans leur nombreuse postérité, on remarque l'historien Georges (1872-1929) et sa fille Nathalie. Les crises, les guerres, les révolutions du XXe siècle ont dispersé cette partie de la famille du prince Eugène.

Des souvenirs qu'il a laissés, la part de sa fille aînée est soigneusement conservée dans les collections royales de Suède et celle de la plus jeune est souvent encore en possession de ses descendants autrichiens. Quand ils ont été préservés, les biens de la branche russe situés soit en Allemagne, soit en Russie sont allés d'enchères en enchères. Des meubles, tableaux ou documents sont encore en Bavière. Le gros des archives a abouti à la bibliothèque de l'Université de Princeton. Le musée de Malmaison a reçu ou acheté quelques raretés.

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